le meurtre d'Anne-Charlotte Poncin

Affaire Anne-Charlotte Poncin : « Notre fille ne s’est pas suicidée »

Margaux Olivier, suspectée du meurtre de son épouse Anne-Charlotte Poncin, une ancienne militaire de 30 ans disparue le 5 janvier 2016 près d’Ambérieu-en-Bugey (Ain), dont le crâne a été retrouvé en février 2023, a été remise en liberté. La famille de la victime est abasourdie.

Par Cyril Michaud, correspondant à Lyon (Rhône)
Le 28 février 2024 à 07h15

« Anne-Charlotte était une fille pleine d’entrain », raconte Bernard Poncin, son papa. « Elle était généreuse et aurait donné sa chemise. Nous étions très proches. Chaque fois qu’il y avait quelque chose, elle m’appelait. » La dernière fois qu’il l’a vue, c’est à Noël 2015, onze jours avant sa disparition. « Et elle allait très bien. »

Que lui est-il donc arrivé ce 5 janvier 2016 ? « C’est elle (Margaux Olivier, son épouse) qui nous a téléphoné pour nous signaler sa disparition. Il devait être 9 heures. » Bernard Poncin est sûr d’une chose : « Notre fille ne s’est pas suicidée. » Il est aussi persuadé que celle dont il ne veut plus prononcer le nom « est impliquée dans sa disparition ». De quelle manière ? « Je ne sais pas. C’est à la justice de le dire. »

En liberté sous contrôle judiciaire
Après dix mois de détention provisoire, Margaux Olivier qui est mise en examen pour meurtre sur conjoint depuis janvier 2022 vient d’être remise en liberté sous contrôle judiciaire avec interdiction de se rendre dans l’Ain.

Une nouvelle que le père d’Anne-Charlotte Poncin a du mal à encaisser : « On ne peut rien faire contre la justice. On doit accepter, mais que c’est difficile ! Cette personne a quand même reconnu devant les gendarmes avoir déplacé le corps de ma fille après l’avoir retrouvée suicidée dans l’appartement. C’est un peu gros. »

Son conseil, Me Bernard Boulloud, partage son scepticisme : « Quand j’ai plaidé ce dossier la semaine dernière à Lyon (Rhône), l’idée de le comparer à l’affaire Jubillar m’est apparue tout de suite. Margaux Olivier a fait des aveux sur lesquels elle est revenue. Elle a caché un téléphone, revendu des armes. Elle a eu un comportement inquiétant, pour ne pas dire troublant, en consultant la rubrique d’un site sur le crime parfait. Et malgré tout ça, on la libère. »

Détenue à la prison de Corbas depuis avril 2023, à la suite de la découverte du crâne d’Anne-Charlotte Poncin en février de la même année dans une forêt près d’Ambérieu-en-Bugey, la veuve éplorée est devenue la principale suspecte de cette affaire. Les mois suivants, les enquêteurs ont également retrouvé des ossements et effets personnels de la victime dans ce bois difficile d’accès.

« Un couple qui battait de l’aile »
« Mon erreur, c’est de lui avoir fait confiance. Nous avons perdu beaucoup de temps », regrette Bernard Poncin. « On a cru tout ce qu’elle nous a dit, comme quoi Anne-Charlotte jouait beaucoup au poker, etc. »

Après la disparition de son épouse, Margaux Olivier a aussi fait une révélation douloureuse à sa belle famille : sa femme, leur a-t-elle avoué, voulait se faire opérer pour changer de sexe. Et elle y était farouchement opposée.

Un projet dont Bernard Poncin n’a jamais entendu parler, mais qui pourrait expliquer les relations tendues du couple Poncin-Olivier. « Oui, il y avait de l’eau dans le gaz », reconnaît Me Boulloud.

Margaux et Anne-Charlotte s’étaient rencontrées au camp militaire de la Valbonne près de Lyon, où elles travaillaient toutes deux avant qu’Anne-Charlotte ne se blesse et soit réformée. Elles vivaient depuis à Ambérieu-en-Bugey et s’étaient mariées six mois avant la disparition de cette dernière.

Avocat de Margaux Olivier, Me Ronald Gallo est persuadé que c’est précisément ce sujet de discorde entre les deux jeunes femmes qui a pu conduire au suicide d’Anne-Charlotte Poncin. « C’est un couple qui battait de l’aile. Il y avait cette ambition de changer de sexe et ma cliente n’était pas d’accord. Dans cette affaire, je pense qu’il faudrait plus travailler sur l’état psychologique de la victime. »

Les tibias fracturés de la victime
Lui se dit pleinement convaincu de l’innocence de Margaux Olivier et soulagé de sa remise en liberté sous contrôle judiciaire : « J’ai rarement vu un tel état de vulnérabilité chez une personne. En prison, elle risquait de mettre fin à ses jours. »

L’avocat espère désormais la nullité des gardes à vue. « On a constamment évoqué les prétendus aveux. Ma cliente a toujours dit que les gendarmes avaient forcé les choses. C’est pour cela que nous avons réclamé les enregistrements à la juge. »

Dix-huit heures de vidéos que l’avocat et son équipe ont passé au peigne fin. « Il y a des pans entiers qui ne sont pas retranscrits dans les procès-verbaux. C’est pourquoi nous avons demandé la nullité des gardes à vue. »

La chambre de l’instruction fera connaître sa décision le 7 mars. Cette requête exaspère Me Bernard Boulloud : « Ce qui a conduit Margaux Olivier en prison, c’est la découverte du crâne et rien d’autre. C’est elle qui en garde à vue a indiqué la zone de recherche aux gendarmes. L’objectif de la défense, c’est d’enterrer cet aveu. »

Lui s’intéresse de près aux ossements retrouvés en forêt, notamment les tibias fracturés de la victime. « J’ai demandé une datation. Une personne qui a les tibias fracturés ne va pas se suicider seule. »

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

Cela fait huit ans que les parents d'Anne-Charlotte Poncin ressassent inlassablement tous les scénarios qui auraient pu conduire à la mort de leur fille, Anne-Charlotte, 30 ans au moment de sa disparition, au tout début de l'année 2016. D'elle on n'a retrouvé qu'un crâne et des ossements. Ses parents ont songé à l'accident mais n'ont jamais cru au suicide. Jusqu'à ce que la thèse d'un possible crime commis par la timide et fragile épouse de leur fille, Margaux Olivier, prenne de l'épaisseur.
Retrouvez tous les jours en podcast le décryptage d'un faits divers, d'un crime ou d'une énigme judiciaire par Jean-Alphonse Richard, entouré de spécialistes, et de témoins d'affaires criminelles.

Ecoutez L'heure du Crime avec Jean-Alphonse Richard du 28 mars 2024
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

EDIT : Désolée Kassandra je viens de voir que j'ai fait un doublon