DIANE Division des Affaires Non Elucidées
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JM
Tivier
Lisetoct
Kassandra88
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Tueur en série : le grêlé. :: AFFAIRES EN COURS :: NON ÉLUCIDÉ
Cellule Cold cases, É. Foray, M.Boisseranc, S.Alloard, C.Giboire, K.Leroy, J.Heusèle, S. Viguier...
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DIANE Division des Affaires Non Elucidées
2022
Division des Affaires Non Elucidées (DiANE)
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En s’appuyant sur les pratiques européennes et anglo-saxonnes existantes, la gendarmerie a dessiné les contours d’une définition non exhaustive.
Il est considéré que les affaires non élucidées « Cold Case » sont des dossiers criminels complexes « hors normes » qui sont :
► Les affaires présentant une complexité particulière. Ce sont des dossiers non clôturés pouvant avoir entre 18 mois et 20 ans, toujours en cours d’investigations et instruits mais malheureusement arrivés dans une impasse.
► Les affaires non prescrites. Il s’agit de dossiers clôturés mais non touchés par la prescription et pour lesquels a pu être délivrée une ordonnance de non-lieu.
► Les affaires présentant un caractère sériel. Ce sont des dossiers pouvant être mis en relation à partir d’éléments probants. Partant d’une affaire résolue avec auteur identifié, il s’agit de rechercher si d’autres faits, non résolus peuvent être imputés au même auteur.
Ces dossiers concernent les infractions qualifiées en homicides, assassinats, viols en série et viols uniques avec tortures et actes de barbaries, disparitions avec cause probable criminelle.
Dans quel cadre la DiANE peut elle agir ?
Cette division peut être saisie dans le cadre des homicides, crimes violents, viols complexes et disparitions inquiétantes. Toute procédure soumise à "l'expertise" du PJGN fait l'objet d'une étude préalable entre la SR et le SCRC.
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Division des Affaires Non Elucidées (DiANE)
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En s’appuyant sur les pratiques européennes et anglo-saxonnes existantes, la gendarmerie a dessiné les contours d’une définition non exhaustive.
Il est considéré que les affaires non élucidées « Cold Case » sont des dossiers criminels complexes « hors normes » qui sont :
► Les affaires présentant une complexité particulière. Ce sont des dossiers non clôturés pouvant avoir entre 18 mois et 20 ans, toujours en cours d’investigations et instruits mais malheureusement arrivés dans une impasse.
► Les affaires non prescrites. Il s’agit de dossiers clôturés mais non touchés par la prescription et pour lesquels a pu être délivrée une ordonnance de non-lieu.
► Les affaires présentant un caractère sériel. Ce sont des dossiers pouvant être mis en relation à partir d’éléments probants. Partant d’une affaire résolue avec auteur identifié, il s’agit de rechercher si d’autres faits, non résolus peuvent être imputés au même auteur.
Ces dossiers concernent les infractions qualifiées en homicides, assassinats, viols en série et viols uniques avec tortures et actes de barbaries, disparitions avec cause probable criminelle.
Dans quel cadre la DiANE peut elle agir ?
Cette division peut être saisie dans le cadre des homicides, crimes violents, viols complexes et disparitions inquiétantes. Toute procédure soumise à "l'expertise" du PJGN fait l'objet d'une étude préalable entre la SR et le SCRC.
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Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
L’idée d’une cellule « cold case » a germé avec l’affaire Maëlys justement. Lors de sa disparition en 2017, la gendarmerie avait mis sur pied une cellule dédiée baptisée «Ariane». C'est sur ce modèle que la «division cold case» a été bâtie.
Comment ça marche ?
Différents départements s’allient et travaillent ensemble pour résoudre ces affaires : celui des atteintes aux personnes, des empreintes digitales, de biologie, des incendies et explosifs ainsi que celui des sciences du comportement.
«On fait collaborer des analystes, des enquêteurs, des scientifiques, des psycho-criminologues… C'est une méthode efficace sur les cold cases car cela apporte un œil neuf. Notre mission est de faire émerger de nouvelles hypothèses ou d'aider les enquêteurs à sortir du tunnel dans lequel ils peuvent se trouver quand ils ont poussé une piste qui n'a pas abouti. Mais par respect pour les victimes et les familles, ces affaires ne doivent pas tomber dans l'oubli» explique dans une interview donnée au Parisien, le colonel Fabrice Bouillié, à la tête du service central du renseignement criminel et chef de la nouvelle « Division cold case ».
Mais le véritable atout des enquêteurs aujourd’hui c’est la révolution des techniques d’identification génétique. C’est grâce en effet à l’ADN que la plupart des « cold case » sont résolus.
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Comment ça marche ?
Différents départements s’allient et travaillent ensemble pour résoudre ces affaires : celui des atteintes aux personnes, des empreintes digitales, de biologie, des incendies et explosifs ainsi que celui des sciences du comportement.
«On fait collaborer des analystes, des enquêteurs, des scientifiques, des psycho-criminologues… C'est une méthode efficace sur les cold cases car cela apporte un œil neuf. Notre mission est de faire émerger de nouvelles hypothèses ou d'aider les enquêteurs à sortir du tunnel dans lequel ils peuvent se trouver quand ils ont poussé une piste qui n'a pas abouti. Mais par respect pour les victimes et les familles, ces affaires ne doivent pas tomber dans l'oubli» explique dans une interview donnée au Parisien, le colonel Fabrice Bouillié, à la tête du service central du renseignement criminel et chef de la nouvelle « Division cold case ».
Mais le véritable atout des enquêteurs aujourd’hui c’est la révolution des techniques d’identification génétique. C’est grâce en effet à l’ADN que la plupart des « cold case » sont résolus.
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Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
La France compte 173 crimes non élucidés pour lesquels la justice est saisie et 68 procédures de crimes sériels, selon le garde des Sceaux. C'est énorme à l'échelle de la population française!!
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PS : je ne sais pas si je suis dans la bonne rubrique (?)
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PS : je ne sais pas si je suis dans la bonne rubrique (?)
Invité- Invité
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Tristann a écrit:La France compte 173 crimes non élucidés pour lesquels la justice est saisie et 68 procédures de crimes sériels, selon le garde des Sceaux. C'est énorme à l'échelle de la population française!!
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PS : je ne sais pas si je suis dans la bonne rubrique (?)
Oui, merci Tristan.
Dans ce pôle, « les magistrats instructeurs auront toute la liberté de poursuivre avec les enquêteurs initiaux ou de saisir un service spécialisé dans les crimes non élucidés, comme la division Diane à Pontoise. Une cosaisine avec les enquêteurs initiaux et les services spécialisés est aussi tout à fait possible », détaille-t-il.
Un pôle judiciaire dédié « aux crimes en série et non élucidés » sera lancé le 1er mars à Nanterre.
Évidemment, plusieurs dossiers sont emblématiques comme l’affaire Grégory Villemin, ce garçonnet retrouvé mort dans la Vologne (Vosges) en 1984, le quadruple meurtre de Chevaline (Haute-Savoie) en 2012 ou encore la disparition il y a dix-neuf ans d’Estelle Mouzin. Mais selon Éric Dupond-Moretti, pas moins de 240 dossiers en cours pourraient être confiés aux trois juges d’instruction, au premier vice-président et deux vice-présidents qui intégreront ce pôle consacré aux « cold cases ».
Parfois « trois ou quatre magistrats qui se succèdent »
Ces magistrats seront « détachés à 100 % » à cette entité basée à Nanterre, dans le ressort de la cour d’appel de Versailles. Ce nouveau pôle doit permettre à ces dossiers « de rester vivants judiciairement et d’offrir une réponse aux victimes », explique Éric Dupond-Moretti en ajoutant : « Dans les cabinets d’instruction, les juges exercent pour un temps limité et sont ensuite remplacés par des collègues. On voit ainsi dans les très longs dossiers, les dossiers complexes, trois ou quatre magistrats qui se succèdent. »
J'espère que le dossier de Paquita Parra passera dans ce pôle car selon "l'heure du crime" des pistes tout-à-fait nouvelles et menant vers le grand banditisme ne peuvent être exploitées faute de JI. (Le juge d'instruction actuel est en congé de maladie et on n'arrive pas à le remplacer).
rekassabdra88
Bonjour,
Si vous jugez que les propos d'Eric Dupond- Moretti sont crédibles alors on n'aurait pas tant de dossiers de crimes non élucidés.
La justice est encombrée de dossiers qu'elle n'arrive même pas à traiter et en plus '' le Juge d'instruction actuel est en congé de maladie et on n'arrive pas à le remplacer'' Kassandra 88 ; une faille dans le système.
Si je me réfère au dossier '' Ministre Robert BOULIN '' l'avocat a saisi l'Etat pour faute lourde'' , un dossier bloqué au TGI de Versailles.
Considerez -vous l'efficacité du système Cold Case dans un système judiciaire en souffrance ?
Si vous jugez que les propos d'Eric Dupond- Moretti sont crédibles alors on n'aurait pas tant de dossiers de crimes non élucidés.
La justice est encombrée de dossiers qu'elle n'arrive même pas à traiter et en plus '' le Juge d'instruction actuel est en congé de maladie et on n'arrive pas à le remplacer'' Kassandra 88 ; une faille dans le système.
Si je me réfère au dossier '' Ministre Robert BOULIN '' l'avocat a saisi l'Etat pour faute lourde'' , un dossier bloqué au TGI de Versailles.
Considerez -vous l'efficacité du système Cold Case dans un système judiciaire en souffrance ?
Invité- Invité
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Bonjour,
L'affaire du double meurtre de la rue de l'Eventail ( Belluardo- Chide /Le Mans 2004 ) sera sûrement réexaminée par la division Cold Case . En tout cas , Julie, la fille de Martine, ne
lâche rien : https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/le-mans-72000/video-le-mans-et-si-l-affaire-belluardo-chide-etait-reexaminee-fdcba2be-749f-11ec-ac16-2e31ae11eb47
L'affaire du double meurtre de la rue de l'Eventail ( Belluardo- Chide /Le Mans 2004 ) sera sûrement réexaminée par la division Cold Case . En tout cas , Julie, la fille de Martine, ne
lâche rien : https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/le-mans-72000/video-le-mans-et-si-l-affaire-belluardo-chide-etait-reexaminee-fdcba2be-749f-11ec-ac16-2e31ae11eb47
Lisetoct
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Bonjour à tous,
article très intéressant, il parle entre autres de Lelandais ou Vérove.
Le terminus des tueurs cachés
Nouvelle série. Le nouveau pôle judiciaire dédié aux « serial killers » met fin à un déni français et fait renaître l’espoir dans des centaines de dossiers.
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Le cas de Nordahl Lelandais est un nouveau rappel d’une sinistre réalité qui reste désespérément sous le radar en France. Une catégorie de citoyens tuent par habitude, sans que leur vie sociale en souffre. Ce type de criminel se dissimule et présente souvent entre deux meurtres un visage social banal, donnant le change jusqu’à l’entourage très proche. Combien de personnes Nordahl Lelandais, ancien militaire de 38 ans, décrit comme agréable par ses nombreuses conquêtes amoureuses féminines et masculines, a-t-il tuées ? Il est jugé à Chambéry, en Savoie, à partir de ce lundi et jusqu’au 18 février, pour l’enlèvement et le meurtre de Maëlys de Araujo, 8 ans, croisée par hasard en août 2017 à un mariage où il n’était pas invité. Lors de l’enquête, on a découvert incidemment que quatre mois auparavant, en avril 2017, il avait aussi tué Arthur Noyer, un jeune homme rencontré également par hasard, à la sortie d’une boîte de nuit. Cette affaire lui a valu vingt ans de réclusion criminelle l’an dernier à l’issue d’un premier procès – il encourt la perpétuité dans le dossier Maëlys. La gendarmerie a ressorti 900 dossiers de disparitions et de crimes non résolus traités dans une cellule baptisée « Ariane », pour finalement recommander la relance des investigations sur l’hypothèse Lelandais dans dix-huit de ces affaires. Le système pénal envisage très sérieusement une énorme carrière criminelle et survole donc l’ensemble du parcours du meurtrier. C’est en soi une nouveauté.
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Pour mesurer le déni longtemps opposé par les autorités politiques et judiciaires françaises aux notions de tueurs et de crimes en série, il faut remonter à l’affaire des disparus de Mourmelon. Entre 1981 et 1987, six appelés du contingent affectés au camp militaire de la ville de la Marne et deux autres jeunes hommes disparaissent alors qu’ils font de l’auto-stop dans cette zone. Les corps de deux victimes sont découverts faiblement dissimulés en pleine forêt. Ce n’est qu’à partir de 1985 que la gendarmerie commence à envisager sérieusement la piste criminelle et c’est donc en pleine psychose que le ministre de la Défense du gouvernement Chirac, André Giraud, se rend à Mourmelon durant l’été 1987. Il se demande alors devant la presse « si on n’est pas en train de construire toute une affaire à partir de faits artificiellement rapprochés ». Rien de bien alarmant, juge-t-il. « On pourrait essayer de trouver des disparitions très comparables dans tout triangle qui serait choisi en France avec le même nombre de population. Sur le plan militaire, il n’y a rien qui paraisse anormal a priori. » Quelques mois plus tard, il ose même utiliser l’expression de « blague ridicule ». À l’Assemblée, son collègue de l’Intérieur Charles Pasqua explique de son côté cette série troublante par des « déséquilibres psychiques, des règlements de compte et de nombreux cas de désertion ».
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Le 9 août 1988 pourtant, dans un chemin forestier de la région de Mâcon, en Saône-et-Loire, les gendarmes contrôlent un combi Volkswagen et son occupant, un certain Pierre Chanal, militaire bien noté depuis les années 1960 et adjudant en poste au camp de Mourmelon depuis 1977. On découvre à l’arrière du véhicule un jeune touriste hongrois qu’il a enlevé, violé et entravé par des chaînes. L’enquête sera dispersée entre plusieurs tribunaux, menée sans cohérence ni méthode et aboutira à un échec : en 1995, Pierre Chanal est libéré. La justice le rattrapera de justesse en 2003, après une bien tardive expertise ADN le confondant pour trois des disparus. Renvoyé devant les assises, il parviendra à échapper à la condamnation en se suicidant au deuxième jour de son procès à Reims, dans la Marne. Il ne restera donc de ce retentissant échec judiciaire que l’ordonnance de mise en accusation, accablante autant pour lui que pour un système d’enquête sceptique, fragmenté et finalement impuissant.
Le noir jardin secret des tueurs en série ne les empêche pas d’élever des enfants, de pointer au travail le matin, de parler football à la machine à café…
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Près de deux décennies plus tard, la création d’un nouveau pôle judiciaire national spécialisé veut tourner définitivement la page de cette époque. Ce pôle est consacré aux tueurs en série et aux crimes pouvant leur être imputés, non résolus depuis au moins 18 mois. ll sera installé à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine, dès ce mardi 1er mars, avec un parquetier et trois juges d’instruction pour commencer. Cette structure a été lancée fin 2021 de manière un peu obscure, par la voie d’un amendement parlementaire logé dans l’article 8 du chapitre III d’un texte de loi sur la « confiance dans l’institution judiciaire », portant surtout d’autres dispositions techniques. L’histoire retiendra que ces quelques lignes mettent fin institutionnellement à une idée longtemps prégnante en France, selon laquelle les tueurs en série n’existeraient que dans la violente société américaine et les films de Hollywood.
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Depuis l’adjudant Chanal, la France a appris que des jeunes gens comme Guy Georges (sept meurtres et plusieurs viols connus) et Patrice Alègre (six meurtres connus), plutôt sympathiques et à la vie amoureuse normale voire riche, pouvaient être par ailleurs d’impitoyables tueurs de femmes. On sait aussi que le crime en série peut s’exercer en couple, comme ce fut le cas de Michel Fourniret et Monique Olivier (douze meurtres connus). On a découvert que ce mode de vie criminel pouvait prendre tous les visages sociaux, celui de l’infirmière Christine Malèvre (six patients tués), celui de militaires comme Pierre Chanal ou Nicolas Charbonnier (un meurtre, une tentative et plusieurs agressions). Et même celui d’un policier père de famille, syndicaliste et conseiller municipal comme François Vérove, alias « le Grêlé ». Aucune de ces personnes ne souffrait, selon les experts, d’une pathologie psychiatrique. Leur noir jardin secret ne les empêche éventuellement pas de se marier et d’élever des enfants, de pointer au travail le matin, de parler football à la machine à café. L’avocat général qui requérait au premier procès Fourniret en 2008 s’étranglait presque dans son réquisitoire face à cette stupéfiante réalité humaine. « Mais comment pouvez-vous dormir ? Comment pouvez-vous manger avec tous ces visages innocents qui hurlent à vos oreilles ? »
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Ce profil d’assassin serein qui cache son comportement derrière une façade de normalité est pourtant relativement typique. Sur fond de fascination souvent malsaine, une masse mondiale d’études n’a pas encore fini d’en faire le tour. Popularisé par les séries télévisées, ce sujet est d’intérêt public depuis longtemps à l’étranger et notamment aux États-Unis où a été lancé dès 2006 un programme entre le FBI et le ministère de la Justice sur les dossiers non résolus, qui fait appel au public et aux universitaires, avec des récompenses. Le nouveau pôle judiciaire de Nanterre va peut-être déjà aider à dresser un bilan français contemporain du phénomène. Il est de toute façon effrayant, alors que le thème est totalement absent du débat politique pourtant obsessionnel sur la sécurité.
Des auteurs de crimes anciens restés impunis peuvent toujours être en activité aujourd’hui, ou récidiver un jour ou l’autre.
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Corinne Herrmann, avocate spécialiste des « cold cases »
Dans l’entretien à 20 Minutes où il a annoncé la création du pôle, le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti a ainsi cité le chiffre de 173 crimes non élucidés pouvant être imputés à des tueurs en série et de 68 procédures distinctes explorant déjà d’autres séries de meurtres. Certaines de ces affaires remontent aux années 1980. « Pour les familles, ces vieux dossiers, ce sont des souffrances toujours vives […]. Ce pôle doit permettre à ces dossiers de rester vivants judiciairement et d’offrir une réponse aux victimes », dit le ministre. Pour le duo d’avocats parisiens formé par Didier Seban et Corinne Herrmann, spécialistes de ces affaires et dont les préconisations ont largement inspiré la création du nouveau pôle, le bilan des crimes en série impunis en France est sûrement bien plus élevé. Ils remarquent que, selon les statistiques officielles, le taux d’élucidation policier des homicides (863 en France en 2020) est stable depuis longtemps, à hauteur des deux tiers, ce qui laisse chaque année des centaines de crimes non résolus. L’écume des jours et le sous-dimensionnement du système judiciaire les font souvent glisser dans l’oubli. Même en écartant les dossiers non liés à des séries, la zone grise est importante. « Nous sommes convaincus qu’il y a beaucoup plus de dossiers que quelques centaines », indique Didier Seban aux Jours. En dehors des homicides, il faudrait prendre en compte, souligne-t-il, les disparitions non élucidées, dont l’appréhension judiciaire est loin d’être immédiate ou automatique. Il n’existe aucun bilan statistique clair de ce phénomène, mais on parle à coup sûr de centaines de personnes par an.
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Par ailleurs, selon Corinne Herrmann, l’enjeu n’est pas limité à l’apaisement des familles dont parle Éric Dupond-Moretti. C’est la sécurité publique qui est l’objet principal du pôle, pour le duo d’avocats. D’après eux, il faut comprendre qu’en laissant la poussière s’entasser sur les dossiers on laisse en paix des tueurs cachés, retraités, semi-retraités ou totalement actifs. « Des auteurs de crimes anciens restés impunis peuvent toujours être en activité aujourd’hui, ou récidiver un jour ou l’autre », souligne Me Herrmann. L’enquête dira peut-être si François Vérove/le Grêlé a encore tué après le dernier fait qu’on lui impute avec certitude, en 1994, avant que la découverte de son identité ne provoque son suicide en septembre dernier. Il y a nécessairement en liberté d’autres François Vérove.
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Pour agir, les juges du nouveau pôle vont disposer de deux armes procédurales nouvelles, fournies par la loi créant le pôle. Ils seront d’abord autorisés à instruire à partir du parcours d’un tueur en série présumé. Ils pourront ainsi tenter de mettre en correspondance des dossiers non résolus avec les éléments de la vie du suspect, ses traces numériques ou des pièces à conviction. Jusqu’à maintenant, la loi n’autorisait qu’à instruire à partir de faits criminels. Bien souvent, les tueurs en série ont été poursuivis plusieurs fois après plusieurs enquêtes partiellement répétitives, tandis qu’une partie de leur « palmarès » était ignoré. Ce fut le cas pour Pierre Chanal, pour le « routard du crime » Francis Heaulme (dix procès entre 1994 et 2017) ou plus récemment pour Nordahl Lelandais. Ce saucissonnage qui gaspille les énergies et s’avère préjudiciable à la compréhension globale d’un cas devrait donc se terminer. Les juges bénéficieront aussi d’une seconde innovation procédurale, le versement systématique au Fichier national des empreintes génétiques (Fnaeg) de l’ADN des victimes de crimes non résolus, ce qui permettra des comparaisons automatisées avec les éléments retrouvés dans l’environnement d’un suspect de crimes en série. Créé dans la foulée de l’affaire Guy Georges en 1998, le Fnaeg – qui recèle des millions de profils – était déjà un outil de travail fondamental dans ces affaires… mais seulement côté suspects.
Il faudra trier ce qui peut rester instruit dans les tribunaux existants et ce qui devra être transféré au nouveau pôle. Querelles en perspective
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Dans l’aventure qui commence, les juges du nouveau pôle disposent encore d’autres outils, comme le fichier policier Salvac (une base de données née au début des années 2000 et visant à permettre de relier des crimes en renseignant une série de critères répétitifs), le service de gendarmerie spécialisé Diane (division des affaires non élucidées) constitué à partir de la cellule Ariane dédiée à Nordahl Lelandais ou l’office central de répression des violences aux personnes côté police. D’autres armes se peaufinent, comme le portrait-robot génétique et l’utilisation des données numériques.
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Mais il y aura aussi beaucoup d’obstacles. Il faudra déjà trier ce qui peut rester instruit correctement dans les tribunaux existants et ce qui devra être transféré au nouveau pôle, ce qui pourrait provoquer des querelles de préséance. Il faudra surmonter plus généralement la résistance de l’appareil judiciaire et des services du ministère, qui n’étaient guère favorables à cette nouvelle structure. Même s’il n’y a pas eu de déclaration officielle des syndicats, elle est critiquée dans le contexte de la misère budgétaire qui a provoqué un mouvement inédit en décembre 2021 dans la magistrature. La suspicion envers le ministre y est désormais bien ancrée. Pour les nouveaux juges des « cold cases », pulvériser définitivement la triste légende de la « blague ridicule » est déjà une mission. Le cas Nordahl Lelandais et les dix-huit fantômes qu’il traîne dans son sillage pourraient constituer le premier défi d’importance.
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TexteThierry Lévêque, Photo, Mourad Allili/Sipa, Édité par François Meurisse
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article très intéressant, il parle entre autres de Lelandais ou Vérove.
Le terminus des tueurs cachés
Nouvelle série. Le nouveau pôle judiciaire dédié aux « serial killers » met fin à un déni français et fait renaître l’espoir dans des centaines de dossiers.
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Le cas de Nordahl Lelandais est un nouveau rappel d’une sinistre réalité qui reste désespérément sous le radar en France. Une catégorie de citoyens tuent par habitude, sans que leur vie sociale en souffre. Ce type de criminel se dissimule et présente souvent entre deux meurtres un visage social banal, donnant le change jusqu’à l’entourage très proche. Combien de personnes Nordahl Lelandais, ancien militaire de 38 ans, décrit comme agréable par ses nombreuses conquêtes amoureuses féminines et masculines, a-t-il tuées ? Il est jugé à Chambéry, en Savoie, à partir de ce lundi et jusqu’au 18 février, pour l’enlèvement et le meurtre de Maëlys de Araujo, 8 ans, croisée par hasard en août 2017 à un mariage où il n’était pas invité. Lors de l’enquête, on a découvert incidemment que quatre mois auparavant, en avril 2017, il avait aussi tué Arthur Noyer, un jeune homme rencontré également par hasard, à la sortie d’une boîte de nuit. Cette affaire lui a valu vingt ans de réclusion criminelle l’an dernier à l’issue d’un premier procès – il encourt la perpétuité dans le dossier Maëlys. La gendarmerie a ressorti 900 dossiers de disparitions et de crimes non résolus traités dans une cellule baptisée « Ariane », pour finalement recommander la relance des investigations sur l’hypothèse Lelandais dans dix-huit de ces affaires. Le système pénal envisage très sérieusement une énorme carrière criminelle et survole donc l’ensemble du parcours du meurtrier. C’est en soi une nouveauté.
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Pour mesurer le déni longtemps opposé par les autorités politiques et judiciaires françaises aux notions de tueurs et de crimes en série, il faut remonter à l’affaire des disparus de Mourmelon. Entre 1981 et 1987, six appelés du contingent affectés au camp militaire de la ville de la Marne et deux autres jeunes hommes disparaissent alors qu’ils font de l’auto-stop dans cette zone. Les corps de deux victimes sont découverts faiblement dissimulés en pleine forêt. Ce n’est qu’à partir de 1985 que la gendarmerie commence à envisager sérieusement la piste criminelle et c’est donc en pleine psychose que le ministre de la Défense du gouvernement Chirac, André Giraud, se rend à Mourmelon durant l’été 1987. Il se demande alors devant la presse « si on n’est pas en train de construire toute une affaire à partir de faits artificiellement rapprochés ». Rien de bien alarmant, juge-t-il. « On pourrait essayer de trouver des disparitions très comparables dans tout triangle qui serait choisi en France avec le même nombre de population. Sur le plan militaire, il n’y a rien qui paraisse anormal a priori. » Quelques mois plus tard, il ose même utiliser l’expression de « blague ridicule ». À l’Assemblée, son collègue de l’Intérieur Charles Pasqua explique de son côté cette série troublante par des « déséquilibres psychiques, des règlements de compte et de nombreux cas de désertion ».
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Le 9 août 1988 pourtant, dans un chemin forestier de la région de Mâcon, en Saône-et-Loire, les gendarmes contrôlent un combi Volkswagen et son occupant, un certain Pierre Chanal, militaire bien noté depuis les années 1960 et adjudant en poste au camp de Mourmelon depuis 1977. On découvre à l’arrière du véhicule un jeune touriste hongrois qu’il a enlevé, violé et entravé par des chaînes. L’enquête sera dispersée entre plusieurs tribunaux, menée sans cohérence ni méthode et aboutira à un échec : en 1995, Pierre Chanal est libéré. La justice le rattrapera de justesse en 2003, après une bien tardive expertise ADN le confondant pour trois des disparus. Renvoyé devant les assises, il parviendra à échapper à la condamnation en se suicidant au deuxième jour de son procès à Reims, dans la Marne. Il ne restera donc de ce retentissant échec judiciaire que l’ordonnance de mise en accusation, accablante autant pour lui que pour un système d’enquête sceptique, fragmenté et finalement impuissant.
Le noir jardin secret des tueurs en série ne les empêche pas d’élever des enfants, de pointer au travail le matin, de parler football à la machine à café…
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Près de deux décennies plus tard, la création d’un nouveau pôle judiciaire national spécialisé veut tourner définitivement la page de cette époque. Ce pôle est consacré aux tueurs en série et aux crimes pouvant leur être imputés, non résolus depuis au moins 18 mois. ll sera installé à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine, dès ce mardi 1er mars, avec un parquetier et trois juges d’instruction pour commencer. Cette structure a été lancée fin 2021 de manière un peu obscure, par la voie d’un amendement parlementaire logé dans l’article 8 du chapitre III d’un texte de loi sur la « confiance dans l’institution judiciaire », portant surtout d’autres dispositions techniques. L’histoire retiendra que ces quelques lignes mettent fin institutionnellement à une idée longtemps prégnante en France, selon laquelle les tueurs en série n’existeraient que dans la violente société américaine et les films de Hollywood.
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Depuis l’adjudant Chanal, la France a appris que des jeunes gens comme Guy Georges (sept meurtres et plusieurs viols connus) et Patrice Alègre (six meurtres connus), plutôt sympathiques et à la vie amoureuse normale voire riche, pouvaient être par ailleurs d’impitoyables tueurs de femmes. On sait aussi que le crime en série peut s’exercer en couple, comme ce fut le cas de Michel Fourniret et Monique Olivier (douze meurtres connus). On a découvert que ce mode de vie criminel pouvait prendre tous les visages sociaux, celui de l’infirmière Christine Malèvre (six patients tués), celui de militaires comme Pierre Chanal ou Nicolas Charbonnier (un meurtre, une tentative et plusieurs agressions). Et même celui d’un policier père de famille, syndicaliste et conseiller municipal comme François Vérove, alias « le Grêlé ». Aucune de ces personnes ne souffrait, selon les experts, d’une pathologie psychiatrique. Leur noir jardin secret ne les empêche éventuellement pas de se marier et d’élever des enfants, de pointer au travail le matin, de parler football à la machine à café. L’avocat général qui requérait au premier procès Fourniret en 2008 s’étranglait presque dans son réquisitoire face à cette stupéfiante réalité humaine. « Mais comment pouvez-vous dormir ? Comment pouvez-vous manger avec tous ces visages innocents qui hurlent à vos oreilles ? »
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Ce profil d’assassin serein qui cache son comportement derrière une façade de normalité est pourtant relativement typique. Sur fond de fascination souvent malsaine, une masse mondiale d’études n’a pas encore fini d’en faire le tour. Popularisé par les séries télévisées, ce sujet est d’intérêt public depuis longtemps à l’étranger et notamment aux États-Unis où a été lancé dès 2006 un programme entre le FBI et le ministère de la Justice sur les dossiers non résolus, qui fait appel au public et aux universitaires, avec des récompenses. Le nouveau pôle judiciaire de Nanterre va peut-être déjà aider à dresser un bilan français contemporain du phénomène. Il est de toute façon effrayant, alors que le thème est totalement absent du débat politique pourtant obsessionnel sur la sécurité.
Des auteurs de crimes anciens restés impunis peuvent toujours être en activité aujourd’hui, ou récidiver un jour ou l’autre.
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Corinne Herrmann, avocate spécialiste des « cold cases »
Dans l’entretien à 20 Minutes où il a annoncé la création du pôle, le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti a ainsi cité le chiffre de 173 crimes non élucidés pouvant être imputés à des tueurs en série et de 68 procédures distinctes explorant déjà d’autres séries de meurtres. Certaines de ces affaires remontent aux années 1980. « Pour les familles, ces vieux dossiers, ce sont des souffrances toujours vives […]. Ce pôle doit permettre à ces dossiers de rester vivants judiciairement et d’offrir une réponse aux victimes », dit le ministre. Pour le duo d’avocats parisiens formé par Didier Seban et Corinne Herrmann, spécialistes de ces affaires et dont les préconisations ont largement inspiré la création du nouveau pôle, le bilan des crimes en série impunis en France est sûrement bien plus élevé. Ils remarquent que, selon les statistiques officielles, le taux d’élucidation policier des homicides (863 en France en 2020) est stable depuis longtemps, à hauteur des deux tiers, ce qui laisse chaque année des centaines de crimes non résolus. L’écume des jours et le sous-dimensionnement du système judiciaire les font souvent glisser dans l’oubli. Même en écartant les dossiers non liés à des séries, la zone grise est importante. « Nous sommes convaincus qu’il y a beaucoup plus de dossiers que quelques centaines », indique Didier Seban aux Jours. En dehors des homicides, il faudrait prendre en compte, souligne-t-il, les disparitions non élucidées, dont l’appréhension judiciaire est loin d’être immédiate ou automatique. Il n’existe aucun bilan statistique clair de ce phénomène, mais on parle à coup sûr de centaines de personnes par an.
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Par ailleurs, selon Corinne Herrmann, l’enjeu n’est pas limité à l’apaisement des familles dont parle Éric Dupond-Moretti. C’est la sécurité publique qui est l’objet principal du pôle, pour le duo d’avocats. D’après eux, il faut comprendre qu’en laissant la poussière s’entasser sur les dossiers on laisse en paix des tueurs cachés, retraités, semi-retraités ou totalement actifs. « Des auteurs de crimes anciens restés impunis peuvent toujours être en activité aujourd’hui, ou récidiver un jour ou l’autre », souligne Me Herrmann. L’enquête dira peut-être si François Vérove/le Grêlé a encore tué après le dernier fait qu’on lui impute avec certitude, en 1994, avant que la découverte de son identité ne provoque son suicide en septembre dernier. Il y a nécessairement en liberté d’autres François Vérove.
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Pour agir, les juges du nouveau pôle vont disposer de deux armes procédurales nouvelles, fournies par la loi créant le pôle. Ils seront d’abord autorisés à instruire à partir du parcours d’un tueur en série présumé. Ils pourront ainsi tenter de mettre en correspondance des dossiers non résolus avec les éléments de la vie du suspect, ses traces numériques ou des pièces à conviction. Jusqu’à maintenant, la loi n’autorisait qu’à instruire à partir de faits criminels. Bien souvent, les tueurs en série ont été poursuivis plusieurs fois après plusieurs enquêtes partiellement répétitives, tandis qu’une partie de leur « palmarès » était ignoré. Ce fut le cas pour Pierre Chanal, pour le « routard du crime » Francis Heaulme (dix procès entre 1994 et 2017) ou plus récemment pour Nordahl Lelandais. Ce saucissonnage qui gaspille les énergies et s’avère préjudiciable à la compréhension globale d’un cas devrait donc se terminer. Les juges bénéficieront aussi d’une seconde innovation procédurale, le versement systématique au Fichier national des empreintes génétiques (Fnaeg) de l’ADN des victimes de crimes non résolus, ce qui permettra des comparaisons automatisées avec les éléments retrouvés dans l’environnement d’un suspect de crimes en série. Créé dans la foulée de l’affaire Guy Georges en 1998, le Fnaeg – qui recèle des millions de profils – était déjà un outil de travail fondamental dans ces affaires… mais seulement côté suspects.
Il faudra trier ce qui peut rester instruit dans les tribunaux existants et ce qui devra être transféré au nouveau pôle. Querelles en perspective
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Dans l’aventure qui commence, les juges du nouveau pôle disposent encore d’autres outils, comme le fichier policier Salvac (une base de données née au début des années 2000 et visant à permettre de relier des crimes en renseignant une série de critères répétitifs), le service de gendarmerie spécialisé Diane (division des affaires non élucidées) constitué à partir de la cellule Ariane dédiée à Nordahl Lelandais ou l’office central de répression des violences aux personnes côté police. D’autres armes se peaufinent, comme le portrait-robot génétique et l’utilisation des données numériques.
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Mais il y aura aussi beaucoup d’obstacles. Il faudra déjà trier ce qui peut rester instruit correctement dans les tribunaux existants et ce qui devra être transféré au nouveau pôle, ce qui pourrait provoquer des querelles de préséance. Il faudra surmonter plus généralement la résistance de l’appareil judiciaire et des services du ministère, qui n’étaient guère favorables à cette nouvelle structure. Même s’il n’y a pas eu de déclaration officielle des syndicats, elle est critiquée dans le contexte de la misère budgétaire qui a provoqué un mouvement inédit en décembre 2021 dans la magistrature. La suspicion envers le ministre y est désormais bien ancrée. Pour les nouveaux juges des « cold cases », pulvériser définitivement la triste légende de la « blague ridicule » est déjà une mission. Le cas Nordahl Lelandais et les dix-huit fantômes qu’il traîne dans son sillage pourraient constituer le premier défi d’importance.
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TexteThierry Lévêque, Photo, Mourad Allili/Sipa, Édité par François Meurisse
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Invité- Invité
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Concernant Heaulme, à l'époque les gendarmes avaient croisés ses nombreux déplacements de routard avec les crimes non élucidés et si je ne me trompe pas on était à 100 ou 150 affaires qui matchaient d'un point de vue localisation. Bon forcément un individu qui change constamment de département a plus de chance de se retrouver à proximité de faits criminels. Mais tout de même c'est troublant. En ce qui me concerne j'ai toujours pensé qu'il y avait encore des victimes non identifiées du routard du crime.
Tivier
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Concernant Heaulme, il est aussi possible qu'il ait aussi tué en prison.
''Les voix du crime'' avec Jean Ffrancois Abgrall :
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A la fin de l'émission, JFA évoque un décès survenu dans la cellule de Francis Heaulme à la maison centrale d'Einsisheim.
Cordialement,
''Les voix du crime'' avec Jean Ffrancois Abgrall :
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A la fin de l'émission, JFA évoque un décès survenu dans la cellule de Francis Heaulme à la maison centrale d'Einsisheim.
Cordialement,
JM
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Oui ,Tivier. Quand les enquêteurs ne prennent pas la peine de geler les scènes de crime , quand on détruit des scellés , quand et quand trop d'incompétences s'amoncèlent , cela mène à un fiasco judiciaire.Tivier a écrit:Concernant Heaulme, à l'époque les gendarmes avaient croisés ses nombreux déplacements de routard avec les crimes non élucidés et si je ne me trompe pas on était à 100 ou 150 affaires qui matchaient d'un point de vue localisation. Bon forcément un individu qui change constamment de département a plus de chance de se retrouver à proximité de faits criminels. Mais tout de même c'est troublant. En ce qui me concerne j'ai toujours pensé qu'il y avait encore des victimes non identifiées du routard du crime.
Lisetoct
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Bonjour,
A propos de Willy Van Coppernolle, un article très complet et récent du Monde, malheureusement réservé aux abonnés (n'hésitez pas à me DM) et un article moins complet, mais néanmoins de RMC Crimes.
Ce criminel belge, assassin d'un enfant de 11 ans en 1993 (selon un MO qui rappelle plusieurs affaires des disparus de L'Isère) et violeur de plusieurs auto-stoppeurs, a erré dans toute l'Europe, et probablement aussi en Afrique du Nord, de la fin des années 1960 à 1993, vivant d'escroqueries et de vols. Il a effectué de nombreux courts passages en prison, sans qu'on ne prenne la mesure de sa dangerosité. Ses victimes sont toutes persuadées d'êtres passées tout près de la mort, le décrivent comme un manipulateur et un individu très intelligent. Il a aujourd'hui 79 ans et son parcours est étudié par le pôle de Nanterre. Tueur en série ou non ? Pour ma part je pense qu'il n'a rien à envier à un Fourniret.
A propos de Willy Van Coppernolle, un article très complet et récent du Monde, malheureusement réservé aux abonnés (n'hésitez pas à me DM) et un article moins complet, mais néanmoins de RMC Crimes.
Ce criminel belge, assassin d'un enfant de 11 ans en 1993 (selon un MO qui rappelle plusieurs affaires des disparus de L'Isère) et violeur de plusieurs auto-stoppeurs, a erré dans toute l'Europe, et probablement aussi en Afrique du Nord, de la fin des années 1960 à 1993, vivant d'escroqueries et de vols. Il a effectué de nombreux courts passages en prison, sans qu'on ne prenne la mesure de sa dangerosité. Ses victimes sont toutes persuadées d'êtres passées tout près de la mort, le décrivent comme un manipulateur et un individu très intelligent. Il a aujourd'hui 79 ans et son parcours est étudié par le pôle de Nanterre. Tueur en série ou non ? Pour ma part je pense qu'il n'a rien à envier à un Fourniret.
Cyclope
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Condamné en 1995 à la perpétuité pour l’assassinat d’un enfant et le viol de deux adolescents, le criminel belge n’a peut-être pas livré tous ses secrets. Le pôle national des crimes en série ou non élucidés de Nanterre l’a inscrit sur sa liste de suspects. Ceux qui ont survécu à ses sévices, persuadés qu’il a fait d’autres victimes, espèrent la poursuite de l’enquête.
Pierre a 21 ans en 1981, la vie est belle. Il a traversé l’Allemagne et l’Angleterre en stop, jamais de problème. Il a voté Georges Marchais puis François Mitterrand à la présidentielle et s’est baigné dans une fontaine à Lyon pour fêter la victoire de la gauche. Le 29 mai, ce futur pompier est pris en stop devant les arènes de Fréjus par un homme en Fiat Ritmo rouge, direction Paris.
Le soir, ils s’arrêtent pour casser la croûte en Bourgogne, dans les vignes de Puligny-Montrachet, au bord de la N6. Il fait nuit, il pleut. Selon son récit, l’automobiliste, un gars sympa, lui propose un petit jeu « comme à la colo » : tends le bras gauche devant, plie le bras droit derrière. Pierre s’exécute, pourquoi se méfier ? Le type lui attrape le bras droit, le lui tord, lui colle le couteau ayant servi au pique-nique sous la gorge.
Pierre (qui n’a pas souhaité donner son nom de famille), pourtant sportif, ne peut pas réagir. « Je bouge, il coupe. » Il pense que l’agresseur va le tuer. Son visage est « un masque de Frankenstein, avec le regard vide d’un fou furieux », confie-t-il aujourd’hui. L’homme renforce sa prise sur son bras, ouvre sa braguette, sort son sexe et demande : « Est-ce que tu l’as déjà fait ? » Pierre avait pensé à la mort, pas au viol.
La plainte disparaît
Quand la fellation forcée est finie, le criminel lâche cyniquement : « Si tu veux, tu peux recracher. » En se reboutonnant, il lui assure que « ça aurait pu être pire ». Ils reprennent la route, un gendarme les arrête pour les prévenir qu’il y a des inondations. Le type reste « à l’aise comme Baptiste, imperturbable : pour lui, il n’a rien fait », poursuit Pierre.
Face au représentant de l’ordre, il pourrait hurler, mais quels mots choisir ? « Je n’ai pas compris que c’était un viol, j’étais heureux d’être vivant. » Ils s’arrêtent à Nolay, près de Beaune, pour boire un coup. Au bar, Pierre indique à son agresseur : « C’est fini, je reste ici. » Le type s’en fiche et s’en va. « Un homme glacial, précis, implacable, sans compassion. Un pervers psychopathe, impulsif mais très préparé », analyse-t-il avec le recul.
Quarante-deux ans plus tard, Pierre est un homme costaud, cheveux rares et ras, carré dehors mais en morceaux dedans. Commandant de pompiers à la retraite, il conduit sa Twingo automatique sur la N6 devenue D908 et s’arrête à l’endroit des faits. Sous le soleil, des hommes taillent les vignes. « Ici, c’est de la bouteille à 300 euros », sourit-il.
Les mots se déversent en flot continu pendant des heures, seules de brusques montées de larmes l’interrompent. « Je suis toujours au bord du gouffre. Après ça, on côtoie la folie. On bascule dans un sentiment d’abandon. » Le soir des faits, Pierre file tout raconter à la gendarmerie de Nolay. « J’ai donné le signalement de la voiture, dit : “Il est dangereux, il va recommencer.” Le gendarme m’a répondu : “S’il y a du nouveau, le parquet vous contactera.” » Personne ne rappelle, la plainte disparaît, aucune autorité n’enquête.
L’affaire est prescrite
Tous les trois mois, Pierre contacte en vain le parquet de Dijon, en cachette de son père pasteur protestant et de sa mère infirmière, auxquels il n’a rien révélé. Du crime, Pierre ne parle qu’à son copain Maxime (qui n’a pas souhaité communiquer son nom de famille), un an plus tard. Les deux amis lancent leur enquête. D’abord, pour retrouver la voiture de l’agresseur, immatriculée en Espagne.
Pierre apprend que le véhicule a été loué sous une fausse identité, avec des papiers volés à un autre auto-stoppeur, à Grenade. A l’été 1983, il s’y rend à moto avec Maxime. « On avait tous les deux une arme, explique ce dernier. Je ne sais pas ce qu’on aurait fait si on était tombés sur lui. J’étais virulent, révolté par l’acte et l’attitude des gendarmes. » Leur quête reste vaine. Au bout de six ans, Pierre brûle son dossier.
En 1993, il lit dans le journal qu’un certain Willy Van Coppernolle a été arrêté, accusé d’avoir tué un jeune garçon et violé deux auto-stoppeurs. Tout lui rappelle son affaire. Il fonce à la gendarmerie et reconnaît le suspect sur photo. Avant de déchanter : son affaire est prescrite. En outre, le parquet de Dijon ne trouve « aucune trace » de la plainte n° 303. Enregistrée le 30 mai 1981 à la brigade territoriale (BT) de Nolay, elle a, lui dit-on, « sans doute été égarée ». Pierre sera indemnisé pour cette faute reconnue par l’Etat, « dans les 4 000 euros ». Il verse l’intégralité de cette somme qui, selon lui, « n’est pas de l’argent mérité », à une association.
Il prétend adorer les enfants
Deux ans plus tard, en 1995, aux assises de Nîmes, Pierre reconnaît immédiatement son agresseur dans le box des accusés, « la voix, la démarche, l’intonation, l’accent, le regard, les rictus, les mimiques ». Le 27 mars 1993, Willy Van Coppernolle a massacré le jeune Abdeljabbar Dkhissi, 11 ans, enlevé dans la rue à Remoulins, dans le Gard. Il lui a fracassé la boîte crânienne à coups de pierres avant de jeter le corps dénudé, juste enveloppé d’une serviette, dans des fourrés. On ignore s’il l’a violé : quand il a conduit les gendarmes au cadavre, la putréfaction empêchait toute recherche de violences sexuelles.
« Dans cette affaire, je n’ai pas d’excuses, concède le citoyen belge aux assises, cité par Libération. C’est moi qui ai pris cette vie. Mais à aucun moment ce petit garçon n’a été déshonoré. Même par un petit doigt. Tout l’après-midi, c’est dur à dire, mais on a rigolé, on s’est amusé. » Il prétend adorer les enfants. « C’est sacré », a-t-il lancé à un psychologue en 1993 : il pleure devant l’émission de télévision de Jacques Martin « L’Ecole des fans ». Huit jours après le meurtre du petit Abdel, il viole deux adolescents pris en stop.
En mars 1995, pour ces trois crimes, il est condamné à perpétuité, la peine étant assortie de vingt-deux ans de sûreté. A ce procès, Pierre, qui a alors 34 ans, est seulement témoin, pas plaignant, puisque sa plainte a disparu. Quand il s’avance à la barre, il attend ce moment depuis quatorze ans. Il a répété devant un miroir. « Malgré ma plainte, en 1981, un enfant est mort, deux ados ont été violés et beaucoup d’autres se sont tus, regrette-t-il. Je savais qu’il tuerait. »
Bien que chrétien et opposé à la peine de mort, Pierre a pensé à l’éliminer : « Il est tellement intelligent, calculateur… » Après son témoignage, le père d’Abdel lui déclare : « Vous êtes comme mon fils. » Unis dans le malheur. Willy Van Coppernolle, lui, conteste le viol de Pierre : « C’est impossible. J’étais à cette époque en prison en Hollande. » Personne n’a vérifié.
Aux côtés de Nordahl Lelandais
Après trente ans de détention, le Belge est théoriquement libérable. Incarcéré à Bapaume (Pas-de-Calais), il n’a récemment déposé aucune requête pour être remis en liberté, selon le parquet d’Arras. Il a 79 ans et on le soupçonne d’autres crimes. A l’automne, le pôle national des crimes sériels ou non élucidés (cold cases) de Nanterre l’a inscrit sur sa liste de suspects, aux côtés de Nordahl Lelandais ou Patrice Alègre.
Les magistrats retracent son « parcours criminel » pour, éventuellement, le raccrocher à des affaires non élucidées, dont celle dite des « disparus de l’Isère », ces enfants volatilisés dans les années 1980 et 1990 aux alentours de Grenoble. Comme Ludovic Janvier, 6 ans, disparu le 17 mars 1983 à Saint-Martin-d’Hères, et Grégory Dubrulle, 8 ans, enlevé et agressé le 9 juillet 1983 à Grenoble, qui a survécu. « Il nous intéresse surtout dans le dossier Janvier. Il pourrait correspondre à la description de la personne qui a enlevé Ludovic », relève Mᵉ Didier Seban, avocat de la partie civile.
Pour Mᵉ Corinne Herrmann, autre partie civile, « on est peut-être passés à côté d’un tueur en série ». L’avocate s’intéresse depuis 2015 à une éventuelle implication de Willy Van Coppernolle. Une hypothèse « sérieuse mais parmi d’autres », à étudier avec urgence : « Soit c’est lui et il faut le démontrer. Soit ce n’est pas lui et on passe à autre chose. »
Son père est condamné pour inceste
L’enquête s’annonce délicate. Jusqu’à son incarcération, en 1993, l’homme a eu la bougeotte, poursuivant une « impulsion à vagabonder, un instinct », selon un psychologue. Né à Gand, benjamin de seize enfants (le chiffre reste sujet à caution), il est placé à 6 ans dans une institution religieuse, parce que son père est condamné à dix ans pour inceste sur une de ses filles, qu’il a mise enceinte. Entendue dans l’enquête en 1993, l’enfant de douze ans plus âgée que Willy raconte : « Mon père m’a agressée et violée plusieurs fois, je ne sais pas si c’est arrivé à d’autres de mes sœurs. » Sur son frère, elle dit : « Dans la famille, on discute ces derniers temps que Willy était “pour les garçons”. Et il raconterait tout le temps des mensonges. Il serait également très rusé et malin, visant à escroquer les gens. »
Willy Van Coppernolle assure qu’il a lui-même été violé à 7 ans par deux religieux et à 13 ans par un juge de paix. Des assertions invérifiables. Il prétend avoir trouvé l’amour à 20 ans, avec un certain Adrien, mort cinq ans plus tard dans un accident de moto, ce qui l’aurait profondément perturbé et amené à une vie de rapines, de crimes et délits sexuels. Sa vie devient un tourbillon. Il change d’identité en volant des papiers, entre et sort de prison.
Grivèleries, vols, escroqueries… Il est condamné plus de trente fois, dont cinq en Belgique pour « atteinte à la pudeur » ou « rapt de mineur » (en 1966, 1974, 1979, 1982, 1984). Sur ses « problèmes sexuels », il a expliqué au cours de l’enquête judiciaire, que M Le magazine du Monde a consultée : « Quand c’est parti, c’est comme un rouage, ce n’est plus arrêtable. » Il évoque « une machination ». « C’est le diable » qu’il aurait tenté de combattre. « En 1979, j’ai même demandé à être interné dans une clinique psychiatrique, mais les médecins belges ont refusé. Ils disaient que je devais m’accepter moi-même et vivre avec. »
Escroc, c’est son métier
Dans sa vie sociale, il donne le change. Accent belge, air bonhomme et faussement naïf, l’homme se montre chaleureux, affable, courtois. On le prend pour un représentant de commerce. « Le type de l’escroc », selon le directeur de la prison de Louvain, en Belgique, qu’il a souvent fréquentée : « Par sa facilité de parole, il inspirait confiance. »
Fin août 1989, Willy Van Coppernolle débarque à Montélimar, dans la Drôme, libéré après une peine pour vols, escroquerie et attentat à la pudeur. Il s’installe à l’hôtel, offre des tournées générales, qu’il ne payera pas. Il se prétend cadre chez Canon et affirme chercher des jeunes pour les former sur ordinateur. Tout est faux.
Deux policiers l’aident à recruter des gamins, dont les leurs. Il abuse de l’un d’eux. Les assises de la Drôme requalifient le viol en attentat à la pudeur et lui infligent cinq ans de prison. A un psychiatre, Van Coppernolle explique : « J’ai appris que la vérité n’a jamais servi et depuis toujours on m’a obligé à mentir, aussi je fais ma vie en mentant. » Escroc, c’est son métier : « Je tente ma magouille. » Il prétend avoir vendu « pour une forte somme d’argent une argenterie inexistante à l’épouse du procureur du roi, à Bruxelles ». Vérité ou mensonge ? Avec lui, on ne sait jamais.
Sous la menace d’un fusil à pompe
Libéré en mars 1993, il loue une voiture en Belgique, débarque dans une auberge à Tresques, dans le Gard. Cette fois, il se présente comme « ingénieur en chef chez IBM », réserve dix chambres pour des collègues imaginaires. À l’hôtelier sous le charme, il tente de vendre sa voiture louée. Le lendemain, cet ancien légionnaire enlève et tue le petit Abdel, puis revient furax à l’auberge, en prétendant s’être fait voler sa sacoche.
Compatissant, l’hôtelier lui prête 1 400 francs et lui sert à dîner. « En France, c’est comme en Belgique, c’est toujours les Arabes qui font les sales coups », lâche-t-il aux enquêteurs, selon ses propos retranscrits dans le dossier d’instruction. Il a porté plainte au commissariat. « Il a mangé le couscous comme un porc », s’indignera l’aubergiste aux assises, en 1995. « Ah ! non, j’ai mangé la viande, pas la semoule. Je ne la supporte pas », rectifiera Van Coppernolle dans le box des accusés.
En 1993, Marc et Etienne (les prénoms ont été modifiés) font du stop en sortant d’une discothèque quand Willy Van Coppernolle les prend à Armissan, dans l’Aude. Ils ont 16 et 15 ans. Sous la menace d’un fusil à pompe, il les viole et les oblige à des fellations réciproques. « Si tu fais un mouvement trop brusque, je loge une balle dans la tête de ton copain », menace-t-il Etienne.
Grâce à leurs témoignages, il sera arrêté quelques jours plus tard, puis condamné en 1995. Contrairement à Pierre, Marc a pu être reconnu comme victime, mais cela ne change pas grand-chose. Il y pense tous les jours « comme si c’était hier », explique-t-il aujourd’hui. Avec cette certitude : « L’enquête n’a pas été jusqu’au bout. Depuis trente ans, je dis qu’il y a d’autres victimes. J’en suis sûr à 200 %. »
Les gendarmes ne croient ni Marc ni Etienne
Pour Marc, la certitude de mourir était la plus pénible. « Il y a l’acte, humiliant et douloureux, dans la violence. Mais le plus dur, c’est d’attendre la mort. On a eu de la chance de ne pas y rester. » Il se considère comme un survivant. « On a eu l’intelligence de se faire passer pour des gays », se pliant au jeu pervers imposé par leur agresseur. Au début, les gendarmes ne croient ni Marc ni Etienne quand ils portent plainte. « Ils nous mettaient en porte-à-faux, m’ont dit que je mentais, on a même failli en venir aux mains avec Etienne », déplore Marc. Il vit ensuite terrorisé, persuadé que l’homme reviendra les achever.
Arrêté, Willy Van Coppernolle se plaindra auprès d’un psychologue que les deux victimes « ne savaient pas faire de fellation ». Devant le juge, il ironisera, se disant « étonné d’avoir été capable de faire tant de choses » : « Sodomiser à sept reprises, un fusil à la main, il faut le faire. J’ai travaillé sept ans dans un cirque, je n’ai jamais imaginé pouvoir faire cela. »
En arrivant au procès, en 1995, Marc pensait : « Ouf ! On va être libérés. » Erreur. « On n’est jamais libéré. » Lors des audiences, l’ambiance est électrique. Mᵉ Charles-Etienne Sanconie raconte avoir assisté l’accusé sous les « regards comme des baïonnettes » du public, qui le somme de se justifier : comment peut-il défendre une telle « ordure » ? Il explique à la foule hostile que représenter un accusé ne signifie pas approuver ses actes.
L’avocat confie qu’il n’avait pourtant aucune sympathie pour ce « véritable salaud et manipulateur » : « Même si un client a commis des faits odieux, il reste néanmoins un homme. Chez lui, on ne voyait pas trop ce qui restait d’humanité. » Sa consœur, Mᵉ Paola Bellotti, partie civile, fond en larmes, écœurée par cet accusé « arrogant » qui se prétend victime. « C’était toujours la faute des autres, se souvient-elle. Le petit Abdel était soi-disant monté spontanément dans sa voiture. »
« Faut se dépêcher »
Aux assises, Willy Van Coppernolle, tout d’un coup étrangement ému, finit par reconnaître les viols de Marc et d’Etienne. Jusque-là, il soutenait qu’ils étaient consentants. « Si j’avais pu avoir une fois dans ma vie une relation sexuelle normale, je ne serais pas là », prétend-il. Il se pose en victime : « Mes problèmes datent de mon enfance. » Aucun sentiment de culpabilité, relèvent les experts. Quand la cour d’assises le déclare coupable, en 1995, le père de Marc crie : « On a gagné. » « Il ne s’était jamais exprimé », confie son fils. Ses parents, qui ont découvert les détails des faits lors de l’audience, ne s’en remettront pas. « Mon père s’est suicidé il y a dix ou douze ans, en partie à cause de ça. »
Marc combat ses démons intérieurs à sa manière. Après les viols, en 1993, il répare des Mobylette. « Démonter, remonter. Pour éviter de plonger. » Montrer « qu’il ne nous a pas détruits ». Le combat continue aujourd’hui. « Toujours à essayer de m’occuper l’esprit. Je bosse, je bosse, j’en ai marre. Et je fais des recherches sur lui depuis trente ans. » Marc a tout raconté à ses enfants, « qui ne savaient pas ». Il se pense « né pour subir des épreuves » et s’inquiète : « Faut se dépêcher. Il a 80 ans. Faut le faire craquer. Il y a d’autres victimes. »
Difficile de supporter la vie avec de tels boulets. Pierre a été hospitalisé trois fois en psychiatrie : « On m’a diagnostiqué schizophrène, puis bipolaire, puis rien du tout. » Il a voulu s’acheter une arme pour se tirer une balle mais s’est arrêté à temps. Il s’est résigné à mener une vie « dans les clous, comme les autres », en s’accrochant à cette phrase de Nietzsche : « La pensée du suicide est une puissante consolation, elle aide à passer plus d’une mauvaise nuit. » Il espère être confronté à Van Coppernolle dans le cadre d’une enquête judiciaire. « Aider à élucider d’autres affaires, ça lui ferait vraiment du bien », glisse son copain Maxime.
Un camp de scouts à Rabat
En 1983, Pierre avait remonté le fil jusqu’à celle qu’il appelle la « dame de Rabat », professeure de lettres au lycée français de la capitale marocaine. Il l’a rencontrée pendant l’été en France, mais a égaré son identité. Dans son souvenir, elle lui a raconté qu’un homme était venu, à Pâques, en 1981, animer un camp de scouts de garçons de 10 à 12 ans à Rabat. « Une quarantaine d’années, d’origine belge, à l’allure dynamique, plutôt sympathique et avenant », aurait-elle décrit à Pierre. Son totem : Okapi.
La « dame de Rabat » héberge cet inconnu, son fils participe au camp. Selon Pierre, au retour, certains enfants évoquent auprès de leurs parents des punitions, des jeux bizarres, sous la tente, seuls avec Okapi. Des attouchements, des jeux à caractère sexuel. Le mot « viol » est prononcé quelquefois, « atteinte à la pudeur », « corruption de mineur », souvent.
Un matin, alors que la rumeur monte, Okapi disparaît. Un mois plus tard, il écrit une carte d’Andalousie à la professeure. Il est à l’hôtel dans la région et la remercie chaleureusement pour son hospitalité. Les parents du camp scout écrivent à l’hôtelier : « Méfiez-vous, il s’intéresse aux enfants. »
Pour Pierre, nul doute que Willy Van Coppernolle est Okapi. Car l’homme l’ayant violé à la même époque avait donné cet hôtel comme adresse pour la location de la voiture. Et, lorsque Pierre a enquêté sur place avec son ami Maxime, les propriétaires de l’établissement ont confirmé ses soupçons. Mais comment être sûr ? Il attend toujours que les enquêteurs de Nanterre s’intéressent à ses éléments.
Pierre a 21 ans en 1981, la vie est belle. Il a traversé l’Allemagne et l’Angleterre en stop, jamais de problème. Il a voté Georges Marchais puis François Mitterrand à la présidentielle et s’est baigné dans une fontaine à Lyon pour fêter la victoire de la gauche. Le 29 mai, ce futur pompier est pris en stop devant les arènes de Fréjus par un homme en Fiat Ritmo rouge, direction Paris.
Le soir, ils s’arrêtent pour casser la croûte en Bourgogne, dans les vignes de Puligny-Montrachet, au bord de la N6. Il fait nuit, il pleut. Selon son récit, l’automobiliste, un gars sympa, lui propose un petit jeu « comme à la colo » : tends le bras gauche devant, plie le bras droit derrière. Pierre s’exécute, pourquoi se méfier ? Le type lui attrape le bras droit, le lui tord, lui colle le couteau ayant servi au pique-nique sous la gorge.
Pierre (qui n’a pas souhaité donner son nom de famille), pourtant sportif, ne peut pas réagir. « Je bouge, il coupe. » Il pense que l’agresseur va le tuer. Son visage est « un masque de Frankenstein, avec le regard vide d’un fou furieux », confie-t-il aujourd’hui. L’homme renforce sa prise sur son bras, ouvre sa braguette, sort son sexe et demande : « Est-ce que tu l’as déjà fait ? » Pierre avait pensé à la mort, pas au viol.
La plainte disparaît
Quand la fellation forcée est finie, le criminel lâche cyniquement : « Si tu veux, tu peux recracher. » En se reboutonnant, il lui assure que « ça aurait pu être pire ». Ils reprennent la route, un gendarme les arrête pour les prévenir qu’il y a des inondations. Le type reste « à l’aise comme Baptiste, imperturbable : pour lui, il n’a rien fait », poursuit Pierre.
Face au représentant de l’ordre, il pourrait hurler, mais quels mots choisir ? « Je n’ai pas compris que c’était un viol, j’étais heureux d’être vivant. » Ils s’arrêtent à Nolay, près de Beaune, pour boire un coup. Au bar, Pierre indique à son agresseur : « C’est fini, je reste ici. » Le type s’en fiche et s’en va. « Un homme glacial, précis, implacable, sans compassion. Un pervers psychopathe, impulsif mais très préparé », analyse-t-il avec le recul.
Quarante-deux ans plus tard, Pierre est un homme costaud, cheveux rares et ras, carré dehors mais en morceaux dedans. Commandant de pompiers à la retraite, il conduit sa Twingo automatique sur la N6 devenue D908 et s’arrête à l’endroit des faits. Sous le soleil, des hommes taillent les vignes. « Ici, c’est de la bouteille à 300 euros », sourit-il.
Les mots se déversent en flot continu pendant des heures, seules de brusques montées de larmes l’interrompent. « Je suis toujours au bord du gouffre. Après ça, on côtoie la folie. On bascule dans un sentiment d’abandon. » Le soir des faits, Pierre file tout raconter à la gendarmerie de Nolay. « J’ai donné le signalement de la voiture, dit : “Il est dangereux, il va recommencer.” Le gendarme m’a répondu : “S’il y a du nouveau, le parquet vous contactera.” » Personne ne rappelle, la plainte disparaît, aucune autorité n’enquête.
L’affaire est prescrite
Tous les trois mois, Pierre contacte en vain le parquet de Dijon, en cachette de son père pasteur protestant et de sa mère infirmière, auxquels il n’a rien révélé. Du crime, Pierre ne parle qu’à son copain Maxime (qui n’a pas souhaité communiquer son nom de famille), un an plus tard. Les deux amis lancent leur enquête. D’abord, pour retrouver la voiture de l’agresseur, immatriculée en Espagne.
Pierre apprend que le véhicule a été loué sous une fausse identité, avec des papiers volés à un autre auto-stoppeur, à Grenade. A l’été 1983, il s’y rend à moto avec Maxime. « On avait tous les deux une arme, explique ce dernier. Je ne sais pas ce qu’on aurait fait si on était tombés sur lui. J’étais virulent, révolté par l’acte et l’attitude des gendarmes. » Leur quête reste vaine. Au bout de six ans, Pierre brûle son dossier.
En 1993, il lit dans le journal qu’un certain Willy Van Coppernolle a été arrêté, accusé d’avoir tué un jeune garçon et violé deux auto-stoppeurs. Tout lui rappelle son affaire. Il fonce à la gendarmerie et reconnaît le suspect sur photo. Avant de déchanter : son affaire est prescrite. En outre, le parquet de Dijon ne trouve « aucune trace » de la plainte n° 303. Enregistrée le 30 mai 1981 à la brigade territoriale (BT) de Nolay, elle a, lui dit-on, « sans doute été égarée ». Pierre sera indemnisé pour cette faute reconnue par l’Etat, « dans les 4 000 euros ». Il verse l’intégralité de cette somme qui, selon lui, « n’est pas de l’argent mérité », à une association.
Il prétend adorer les enfants
Deux ans plus tard, en 1995, aux assises de Nîmes, Pierre reconnaît immédiatement son agresseur dans le box des accusés, « la voix, la démarche, l’intonation, l’accent, le regard, les rictus, les mimiques ». Le 27 mars 1993, Willy Van Coppernolle a massacré le jeune Abdeljabbar Dkhissi, 11 ans, enlevé dans la rue à Remoulins, dans le Gard. Il lui a fracassé la boîte crânienne à coups de pierres avant de jeter le corps dénudé, juste enveloppé d’une serviette, dans des fourrés. On ignore s’il l’a violé : quand il a conduit les gendarmes au cadavre, la putréfaction empêchait toute recherche de violences sexuelles.
« Dans cette affaire, je n’ai pas d’excuses, concède le citoyen belge aux assises, cité par Libération. C’est moi qui ai pris cette vie. Mais à aucun moment ce petit garçon n’a été déshonoré. Même par un petit doigt. Tout l’après-midi, c’est dur à dire, mais on a rigolé, on s’est amusé. » Il prétend adorer les enfants. « C’est sacré », a-t-il lancé à un psychologue en 1993 : il pleure devant l’émission de télévision de Jacques Martin « L’Ecole des fans ». Huit jours après le meurtre du petit Abdel, il viole deux adolescents pris en stop.
En mars 1995, pour ces trois crimes, il est condamné à perpétuité, la peine étant assortie de vingt-deux ans de sûreté. A ce procès, Pierre, qui a alors 34 ans, est seulement témoin, pas plaignant, puisque sa plainte a disparu. Quand il s’avance à la barre, il attend ce moment depuis quatorze ans. Il a répété devant un miroir. « Malgré ma plainte, en 1981, un enfant est mort, deux ados ont été violés et beaucoup d’autres se sont tus, regrette-t-il. Je savais qu’il tuerait. »
Bien que chrétien et opposé à la peine de mort, Pierre a pensé à l’éliminer : « Il est tellement intelligent, calculateur… » Après son témoignage, le père d’Abdel lui déclare : « Vous êtes comme mon fils. » Unis dans le malheur. Willy Van Coppernolle, lui, conteste le viol de Pierre : « C’est impossible. J’étais à cette époque en prison en Hollande. » Personne n’a vérifié.
Aux côtés de Nordahl Lelandais
Après trente ans de détention, le Belge est théoriquement libérable. Incarcéré à Bapaume (Pas-de-Calais), il n’a récemment déposé aucune requête pour être remis en liberté, selon le parquet d’Arras. Il a 79 ans et on le soupçonne d’autres crimes. A l’automne, le pôle national des crimes sériels ou non élucidés (cold cases) de Nanterre l’a inscrit sur sa liste de suspects, aux côtés de Nordahl Lelandais ou Patrice Alègre.
Les magistrats retracent son « parcours criminel » pour, éventuellement, le raccrocher à des affaires non élucidées, dont celle dite des « disparus de l’Isère », ces enfants volatilisés dans les années 1980 et 1990 aux alentours de Grenoble. Comme Ludovic Janvier, 6 ans, disparu le 17 mars 1983 à Saint-Martin-d’Hères, et Grégory Dubrulle, 8 ans, enlevé et agressé le 9 juillet 1983 à Grenoble, qui a survécu. « Il nous intéresse surtout dans le dossier Janvier. Il pourrait correspondre à la description de la personne qui a enlevé Ludovic », relève Mᵉ Didier Seban, avocat de la partie civile.
Pour Mᵉ Corinne Herrmann, autre partie civile, « on est peut-être passés à côté d’un tueur en série ». L’avocate s’intéresse depuis 2015 à une éventuelle implication de Willy Van Coppernolle. Une hypothèse « sérieuse mais parmi d’autres », à étudier avec urgence : « Soit c’est lui et il faut le démontrer. Soit ce n’est pas lui et on passe à autre chose. »
Son père est condamné pour inceste
L’enquête s’annonce délicate. Jusqu’à son incarcération, en 1993, l’homme a eu la bougeotte, poursuivant une « impulsion à vagabonder, un instinct », selon un psychologue. Né à Gand, benjamin de seize enfants (le chiffre reste sujet à caution), il est placé à 6 ans dans une institution religieuse, parce que son père est condamné à dix ans pour inceste sur une de ses filles, qu’il a mise enceinte. Entendue dans l’enquête en 1993, l’enfant de douze ans plus âgée que Willy raconte : « Mon père m’a agressée et violée plusieurs fois, je ne sais pas si c’est arrivé à d’autres de mes sœurs. » Sur son frère, elle dit : « Dans la famille, on discute ces derniers temps que Willy était “pour les garçons”. Et il raconterait tout le temps des mensonges. Il serait également très rusé et malin, visant à escroquer les gens. »
Willy Van Coppernolle assure qu’il a lui-même été violé à 7 ans par deux religieux et à 13 ans par un juge de paix. Des assertions invérifiables. Il prétend avoir trouvé l’amour à 20 ans, avec un certain Adrien, mort cinq ans plus tard dans un accident de moto, ce qui l’aurait profondément perturbé et amené à une vie de rapines, de crimes et délits sexuels. Sa vie devient un tourbillon. Il change d’identité en volant des papiers, entre et sort de prison.
Grivèleries, vols, escroqueries… Il est condamné plus de trente fois, dont cinq en Belgique pour « atteinte à la pudeur » ou « rapt de mineur » (en 1966, 1974, 1979, 1982, 1984). Sur ses « problèmes sexuels », il a expliqué au cours de l’enquête judiciaire, que M Le magazine du Monde a consultée : « Quand c’est parti, c’est comme un rouage, ce n’est plus arrêtable. » Il évoque « une machination ». « C’est le diable » qu’il aurait tenté de combattre. « En 1979, j’ai même demandé à être interné dans une clinique psychiatrique, mais les médecins belges ont refusé. Ils disaient que je devais m’accepter moi-même et vivre avec. »
Escroc, c’est son métier
Dans sa vie sociale, il donne le change. Accent belge, air bonhomme et faussement naïf, l’homme se montre chaleureux, affable, courtois. On le prend pour un représentant de commerce. « Le type de l’escroc », selon le directeur de la prison de Louvain, en Belgique, qu’il a souvent fréquentée : « Par sa facilité de parole, il inspirait confiance. »
Fin août 1989, Willy Van Coppernolle débarque à Montélimar, dans la Drôme, libéré après une peine pour vols, escroquerie et attentat à la pudeur. Il s’installe à l’hôtel, offre des tournées générales, qu’il ne payera pas. Il se prétend cadre chez Canon et affirme chercher des jeunes pour les former sur ordinateur. Tout est faux.
Deux policiers l’aident à recruter des gamins, dont les leurs. Il abuse de l’un d’eux. Les assises de la Drôme requalifient le viol en attentat à la pudeur et lui infligent cinq ans de prison. A un psychiatre, Van Coppernolle explique : « J’ai appris que la vérité n’a jamais servi et depuis toujours on m’a obligé à mentir, aussi je fais ma vie en mentant. » Escroc, c’est son métier : « Je tente ma magouille. » Il prétend avoir vendu « pour une forte somme d’argent une argenterie inexistante à l’épouse du procureur du roi, à Bruxelles ». Vérité ou mensonge ? Avec lui, on ne sait jamais.
Sous la menace d’un fusil à pompe
Libéré en mars 1993, il loue une voiture en Belgique, débarque dans une auberge à Tresques, dans le Gard. Cette fois, il se présente comme « ingénieur en chef chez IBM », réserve dix chambres pour des collègues imaginaires. À l’hôtelier sous le charme, il tente de vendre sa voiture louée. Le lendemain, cet ancien légionnaire enlève et tue le petit Abdel, puis revient furax à l’auberge, en prétendant s’être fait voler sa sacoche.
Compatissant, l’hôtelier lui prête 1 400 francs et lui sert à dîner. « En France, c’est comme en Belgique, c’est toujours les Arabes qui font les sales coups », lâche-t-il aux enquêteurs, selon ses propos retranscrits dans le dossier d’instruction. Il a porté plainte au commissariat. « Il a mangé le couscous comme un porc », s’indignera l’aubergiste aux assises, en 1995. « Ah ! non, j’ai mangé la viande, pas la semoule. Je ne la supporte pas », rectifiera Van Coppernolle dans le box des accusés.
En 1993, Marc et Etienne (les prénoms ont été modifiés) font du stop en sortant d’une discothèque quand Willy Van Coppernolle les prend à Armissan, dans l’Aude. Ils ont 16 et 15 ans. Sous la menace d’un fusil à pompe, il les viole et les oblige à des fellations réciproques. « Si tu fais un mouvement trop brusque, je loge une balle dans la tête de ton copain », menace-t-il Etienne.
Grâce à leurs témoignages, il sera arrêté quelques jours plus tard, puis condamné en 1995. Contrairement à Pierre, Marc a pu être reconnu comme victime, mais cela ne change pas grand-chose. Il y pense tous les jours « comme si c’était hier », explique-t-il aujourd’hui. Avec cette certitude : « L’enquête n’a pas été jusqu’au bout. Depuis trente ans, je dis qu’il y a d’autres victimes. J’en suis sûr à 200 %. »
Les gendarmes ne croient ni Marc ni Etienne
Pour Marc, la certitude de mourir était la plus pénible. « Il y a l’acte, humiliant et douloureux, dans la violence. Mais le plus dur, c’est d’attendre la mort. On a eu de la chance de ne pas y rester. » Il se considère comme un survivant. « On a eu l’intelligence de se faire passer pour des gays », se pliant au jeu pervers imposé par leur agresseur. Au début, les gendarmes ne croient ni Marc ni Etienne quand ils portent plainte. « Ils nous mettaient en porte-à-faux, m’ont dit que je mentais, on a même failli en venir aux mains avec Etienne », déplore Marc. Il vit ensuite terrorisé, persuadé que l’homme reviendra les achever.
Arrêté, Willy Van Coppernolle se plaindra auprès d’un psychologue que les deux victimes « ne savaient pas faire de fellation ». Devant le juge, il ironisera, se disant « étonné d’avoir été capable de faire tant de choses » : « Sodomiser à sept reprises, un fusil à la main, il faut le faire. J’ai travaillé sept ans dans un cirque, je n’ai jamais imaginé pouvoir faire cela. »
En arrivant au procès, en 1995, Marc pensait : « Ouf ! On va être libérés. » Erreur. « On n’est jamais libéré. » Lors des audiences, l’ambiance est électrique. Mᵉ Charles-Etienne Sanconie raconte avoir assisté l’accusé sous les « regards comme des baïonnettes » du public, qui le somme de se justifier : comment peut-il défendre une telle « ordure » ? Il explique à la foule hostile que représenter un accusé ne signifie pas approuver ses actes.
L’avocat confie qu’il n’avait pourtant aucune sympathie pour ce « véritable salaud et manipulateur » : « Même si un client a commis des faits odieux, il reste néanmoins un homme. Chez lui, on ne voyait pas trop ce qui restait d’humanité. » Sa consœur, Mᵉ Paola Bellotti, partie civile, fond en larmes, écœurée par cet accusé « arrogant » qui se prétend victime. « C’était toujours la faute des autres, se souvient-elle. Le petit Abdel était soi-disant monté spontanément dans sa voiture. »
« Faut se dépêcher »
Aux assises, Willy Van Coppernolle, tout d’un coup étrangement ému, finit par reconnaître les viols de Marc et d’Etienne. Jusque-là, il soutenait qu’ils étaient consentants. « Si j’avais pu avoir une fois dans ma vie une relation sexuelle normale, je ne serais pas là », prétend-il. Il se pose en victime : « Mes problèmes datent de mon enfance. » Aucun sentiment de culpabilité, relèvent les experts. Quand la cour d’assises le déclare coupable, en 1995, le père de Marc crie : « On a gagné. » « Il ne s’était jamais exprimé », confie son fils. Ses parents, qui ont découvert les détails des faits lors de l’audience, ne s’en remettront pas. « Mon père s’est suicidé il y a dix ou douze ans, en partie à cause de ça. »
Marc combat ses démons intérieurs à sa manière. Après les viols, en 1993, il répare des Mobylette. « Démonter, remonter. Pour éviter de plonger. » Montrer « qu’il ne nous a pas détruits ». Le combat continue aujourd’hui. « Toujours à essayer de m’occuper l’esprit. Je bosse, je bosse, j’en ai marre. Et je fais des recherches sur lui depuis trente ans. » Marc a tout raconté à ses enfants, « qui ne savaient pas ». Il se pense « né pour subir des épreuves » et s’inquiète : « Faut se dépêcher. Il a 80 ans. Faut le faire craquer. Il y a d’autres victimes. »
Difficile de supporter la vie avec de tels boulets. Pierre a été hospitalisé trois fois en psychiatrie : « On m’a diagnostiqué schizophrène, puis bipolaire, puis rien du tout. » Il a voulu s’acheter une arme pour se tirer une balle mais s’est arrêté à temps. Il s’est résigné à mener une vie « dans les clous, comme les autres », en s’accrochant à cette phrase de Nietzsche : « La pensée du suicide est une puissante consolation, elle aide à passer plus d’une mauvaise nuit. » Il espère être confronté à Van Coppernolle dans le cadre d’une enquête judiciaire. « Aider à élucider d’autres affaires, ça lui ferait vraiment du bien », glisse son copain Maxime.
Un camp de scouts à Rabat
En 1983, Pierre avait remonté le fil jusqu’à celle qu’il appelle la « dame de Rabat », professeure de lettres au lycée français de la capitale marocaine. Il l’a rencontrée pendant l’été en France, mais a égaré son identité. Dans son souvenir, elle lui a raconté qu’un homme était venu, à Pâques, en 1981, animer un camp de scouts de garçons de 10 à 12 ans à Rabat. « Une quarantaine d’années, d’origine belge, à l’allure dynamique, plutôt sympathique et avenant », aurait-elle décrit à Pierre. Son totem : Okapi.
La « dame de Rabat » héberge cet inconnu, son fils participe au camp. Selon Pierre, au retour, certains enfants évoquent auprès de leurs parents des punitions, des jeux bizarres, sous la tente, seuls avec Okapi. Des attouchements, des jeux à caractère sexuel. Le mot « viol » est prononcé quelquefois, « atteinte à la pudeur », « corruption de mineur », souvent.
Un matin, alors que la rumeur monte, Okapi disparaît. Un mois plus tard, il écrit une carte d’Andalousie à la professeure. Il est à l’hôtel dans la région et la remercie chaleureusement pour son hospitalité. Les parents du camp scout écrivent à l’hôtelier : « Méfiez-vous, il s’intéresse aux enfants. »
Pour Pierre, nul doute que Willy Van Coppernolle est Okapi. Car l’homme l’ayant violé à la même époque avait donné cet hôtel comme adresse pour la location de la voiture. Et, lorsque Pierre a enquêté sur place avec son ami Maxime, les propriétaires de l’établissement ont confirmé ses soupçons. Mais comment être sûr ? Il attend toujours que les enquêteurs de Nanterre s’intéressent à ses éléments.
Association d'Aide aux Victimes des Affaires Non Élucidées
Carte des affaires non élucidées francophones
Manor
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Outch.... C'est du costaud celui là.... Que dire...
En tout cas merci à vous pour le partage de l'article.
En tout cas merci à vous pour le partage de l'article.
" Un meurtre sans des ciseaux qui brillent est comme des asperges sans sauce hollandaise. Sans goût. "
Alfred Hitchcock
Alfred Hitchcock
Pondyness
Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
Dans les cold cases, « réentendre un témoin, même vingt ans après, peut être déterminant »
La capitaine Virginie Lemercier, de la division des affaires non élucidées de la gendarmerie (Diane), nous explique les méthodes mises en œuvre lorsque ses enquêteurs reprennent ces dossiers. Entretien.
Comment procédez-vous quand vous récupérez un « cold case » ? Comment parvenez-vous à repérer d’éventuels trous dans la raquette ?
Virginie Lemercier On relit le dossier dans son intégralité, puis on le déconstruit complètement. On « casse » sa chronologie et on regroupe ses différentes pièces par nature de documents : auditions, actes d’investigation, réquisitions, constatations sur la scène de crime, procès-verbaux de gardes à vue, photographies… Si, pour des faits datant par exemple de 1995, un témoin entendu deux jours après a dit : « J’étais avec Justine, on a vu à telle heure passer un véhicule immatriculé de telle manière », on va tout de suite chercher l’audition de cette Justine, même si elle a eu lieu bien plus tard. Ses propos corroborent-ils ceux du premier témoin ? Note-t-on des contradictions ?
Il se peut aussi que, pour différentes raisons, les enquêteurs n’aient pas pu ente....
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La capitaine Virginie Lemercier, de la division des affaires non élucidées de la gendarmerie (Diane), nous explique les méthodes mises en œuvre lorsque ses enquêteurs reprennent ces dossiers. Entretien.
Comment procédez-vous quand vous récupérez un « cold case » ? Comment parvenez-vous à repérer d’éventuels trous dans la raquette ?
Virginie Lemercier On relit le dossier dans son intégralité, puis on le déconstruit complètement. On « casse » sa chronologie et on regroupe ses différentes pièces par nature de documents : auditions, actes d’investigation, réquisitions, constatations sur la scène de crime, procès-verbaux de gardes à vue, photographies… Si, pour des faits datant par exemple de 1995, un témoin entendu deux jours après a dit : « J’étais avec Justine, on a vu à telle heure passer un véhicule immatriculé de telle manière », on va tout de suite chercher l’audition de cette Justine, même si elle a eu lieu bien plus tard. Ses propos corroborent-ils ceux du premier témoin ? Note-t-on des contradictions ?
Il se peut aussi que, pour différentes raisons, les enquêteurs n’aient pas pu ente....
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Re: DIANE Division des Affaires Non Elucidées
est une volupté de fin gourmet." -
G. COURTELINE
ruth
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